Ce samedi 20 janvier 2018, un grand anniversaire a été célébré au Collège des Bernardins : le Train de la Mémoire a eu l’honneur de célébrer son vingtième anniversaire. Dix voyages ont déjà eu lieu, qui ont emmené chaque fois entre 400 et 500 élèves de Première-Terminale, issus de 15 à 17 établissements scolaires.
Une des activités périscolaires proposées aux élèves de ces Lycées consiste en un voyage d’éveil humaniste en Pologne, expédition au rythme biennal, en vue de permettre à tous ces jeunes de méditer sur la Shoah, et à partir d’elle, de se laisser interroger par tout ce qui en l’homme a permis que cette monstruosité puisse exister. Il y eut d’autres atrocités au XXème siècle, mais l’horreur inouïe générée par la Shoah fut unique, comme les motivations qui l’ont suscitée, spécialement éradiquer le Peuple juif de l’histoire de l’Humanité, ainsi que les Tziganes, et autres catégories humaines jugées indignes d’appartenir à l’Humanité. Nous ne faisons pas un voyage touristique, ni une démarche de procès, mais un voyage en humanité en quête d’un enrichissement et affinement de notre conscience, et un précieux éclaircissement sur notre attitude à venir, pour éviter de laisser le venin de l’antisémitisme, le racisme, la xénophobie, l’ostracisme, et autres pestes mortelles, s’immiscer en nous et autour de nous, ou y proliférer si les germes y sont déjà déposés.
Nous pouvons écouter à Auschwitz ce que toutes ces voix – qu’on a fait taire – ont à nous dire aujourd’hui. Nous pouvons leur rendre le droit à la parole, le droit de retrouver une identité, le droit de retrouver une place dans l’humanité. Il faut extraire ces êtres humains d’un magma comptabilisé en millions, ils étaient chacun un être unique et irremplaçable, arraché à sa terre, à sa communauté, à sa famille, à ses biens, à son avenir, à ses projets, à ses réussites, à ses dons, à ses capacités qui étaient les siennes à faire grandir l’humanité. Chacune de ses vies perdues n’a pas pu apporter au monde ce qu’elle aurait dû lui apporter, et le monde en sera à jamais frappé d’incomplétude. Le monde claudique à cause de leur disparition. La conscience de l’humanité s’est assombrie d’un coup.
Écoutons ce qu’ils ont à nous dire, pour rendre leur mort moins scandaleuse et inutile, écoutons-les nous enseigner ce que nous aurions dû faire pour que tout cela ne soit pas. Et puis, semons la vie à partir de leurs vies répandues en cendres. Écoutons leurs voix nous dire de vivre pleinement, de mettre à profit le temps qui passe, d’apprécier ce qui nous est donné, de ne pas passer à côté de la vie, de ne pas gâcher nos talents, de ne pas éteindre nos intuitions, d’aller au bout de nos projets, de faire fructifier nos compétences, de faire les bons choix qui grandissent et épanouissent ! Honorons leur vie par la nôtre.
Les cendres des victimes d’Auschwitz seraient-elles plus chaudes que nos cœurs ? Puissent les feux des bûchers se transformer en lumière éclairant nos cœurs. Les cendres qui sont montées vers le ciel par les cheminées des crématoires sont retombées sur notre terre. Puissent-elles l’ensemencer de vigilance et d’éveil, de tolérance et d’accueil, de justice et d’amour.
Jean-Marie Martin, oratorien (14 voyages à Auschwitz dont 4 avec le TdM*)
*Train de la Mémoire – Fondateur : Père Jean Dujardin, oratorien – Président : Père Jérôme Prigent, oratorien – Vice-président : Florent Leruste, Salésien de Don Bosco.