Le Père Jean Dujardin au début du 9ème Train de la Mémoire s’est exprimé sur les enjeux de ce projet, voici sa lettre qui est son fil conducteur.
« Pour la neuvième fois nous proposons aux élèves de Première et de Terminale de participer au Train de la Mémoire. Pourquoi ce train et pourquoi aller à Auschwitz ? Il nous faut essayer de montrer en quoi cette proposition est d’une importance extrême. Nous sommes convaincus que le drame de la Shoah qui s’y est déroulé ne doit pas cesser de nous interpeller. Car c’est l’homme dans sa condition d’homme qui est concerné parla volonté nazie d’exterminer le peuple juif et les tziganes. L’horreur de la Shoah n’est hélas pas unique dans l’histoire des horreurs du 20ème siècle, mais elle a atteint un degré d’horreur inouï. Les nazis voulaient en effet « éradiquer » selon leur langage codé le peuple juif, et pas seulement la race juive, dans son histoire, ses symboles, à travers le message dont il était porteur pour l’humanité toute entière. Ce qui veut dire aussi qu’en détruisant la racine c’est la foi chrétienne qui aurait été atteinte dans son propre message sur l’homme. La Shoah dont Auschwitz est devenu le lieu symbolique nous met donc en présence d’une volonté de négation de l’humanité de l’homme telle que la révélation biblique nous la dévoile. Cet évènement peut être regardé comme un « paradigme » de toutes les formes de génocide car quels qu’en soient les mobiles elles supposent toujours la négation de l’humanité de l’homme. Et hélas notre vingt et unième siècle n’est pas à l’abri d’entreprises génocidaires. Il y a encore des camps de concentration dans le monde. Nous allons à Auschwitz parce qu’Auschwitz fut le plus grand camp de concentration et d’extermination de l’histoire du Vingtième siècle. Il nous faut pour cela en connaître rigoureusement l’histoire mais nous devons y aller parce que c’est aussi un acte de mémoire. Ce la ne veut pas dire que la connaissance historique ne s’appuie pas sur la mémoire mais la finalité de la recherche historique c’est de décrire le plus objectivement l’évènement. Faire mémoire c’est poser un acte de fidélité. La mémoire est constitutive de notre identité. Un être qui a perdu sa mémoire ne sait plus qui il est. Elle est donc à la racine de notre conscience, de notre capacité à distinguer le bien du mal, à la racine de l’usage de notre liberté et donc de notre responsabilité. Dans cette perspective aller à Auschwitz c’est donc aussi accepter de nous laisser interpeller par cette négation de l’humanité de l’homme et donc contribuer à la formation de notre conscience. En effet on ne peut pas découvrir ce lieu sans se poser la question. Et moi, si j’avais été là à cette époque, de quelle côté me serais-je situé ? Nous avons choisi de vivre cette expérience par le train, non par imitation de ce qu’ont vécu les déportés qui ont été exterminés, mais parce qu’au-delà de toute préparation historique, ce long voyage nous permet de passer progressivement de la vie quotidienne à la découverte de ce lieu. De même au retour parler entre nous de ce que nous avons vécu est nécessaire. Car il n’est pas simple de trouver les mots pour en rendre compte..
Pour donner plus de force à cette invitation, je vous transmets la réflexion d’une jeune fille venue il y a quelques années : « Personne n’a besoin de partir mais tout le monde revient avec la certitude qu’il fallait y aller… il paraît invraisemblable que quatre jours aient eu autant d’impact sur une vie… Et pourtant quelque chose a changé. Cette expérience n’est pas terminée… Encore maintenant je ne comprends pas… A moi de ne pas oublier ».
Réflexion qu’un autre jeune de vingt ans nous transmet avec toute sa fougue : « Souviens-toi n’est pas fait pour enrichir notre culture mais pour changer les dispositions de notre cœur » ». Père Jean Dujardin.
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